Mirebeau

mirebeau
Le nom du gros hameau de Mirebeau (Mirabellum, Mirabelle), du verbe mirer, regarder, et de l’ancien français bel ou beau, fréquent dans maints noms de châteaux, indique assez qu’il fut un poste fortifié et de surveillance sur une hauteur culminante, à large horizon. Là, s’est dressé un château sur motte, entouré d’une triple enceinte de défenses. De la motte du château, il ne reste que peu de vestiges, mais les cartes anciennes (Cassini en particulier), les cartes actuelles et la photo aérienne restituent bien l’emprise de ce terroir circulaire dans le parcellaire.

Le château était construit sur la pente du plateau, orientée au nord et un peu au-dessous du point culminant, peut-être pour assurer l’alimentation en eau des fossés. Mais du haut de son donjon, la vue portait à l’entour, sur tout le cercle d’horizon, soit la moitié ouest du Bourbonnais, la vallée au-delà du Saint-Amandois, les plateaux de Combraille et jusqu’à la Marche… Sa situation justifie bien le nom de ce château…

La motte ne semble pas avoir été très conséquente, à peine encore marquée sur le terrain. On peut voir son tracé circulaire sur le vieux plan cadastral, ainsi que d’un canal étroit qui la séparait de la basse-cour, à l’intérieur de la première enceinte bordée d’un large fossé. Ce dernier, totalement circulaire et intact au XIXème siècle, existe encore en partie. Le fossé extérieur était encore bien marqué et rempli d’eau; il n’en reste que quelques mares. Quant à la troisième défense, elle se développait au large, encerclant un terroir de près de 40 ares, circulaire et d’un diamètre de 750 mètres. Elle semble avoir été un chemin bordé d’une haie épaisse. Le parcellaire intérieur était organisé comme les rayons d’une roue. Ce terroir, l’un des plus beaux et des mieux conservés de France, se situait au carrefour de deux voies, l’une nord-sud , et une voie transversale, de Saint-Victor vers Bizeneuille

En 1294, Guillaume, Jean, Barthélémy et Mathieu, fils de feu Andraud de Varennes, vendent à Guillaume Parpoint, bourgeois de Montluçon, pour le prix de 35 livres, leur mas de Mirebeau – Mirabel -, avec toutes ses appartenances, sis près de la métairie de Mathieu de Baraciet et du bois de la Fayolle, le tout chargé de 20 sols tournois de cens annuel envers le sieur de Mirebeau .

En 1322, Gauvain II de Blot rend foi et hommage pour sa femme Mahaut, du fief et seigneurie de Mirebeau.

En 1569, le sieur de Mirebeau est vassal justicier de la châtellenie de Hérisson.

En 1664, le sieur des Champs, de Mirebeau, est lieutenant de la châtellenie de Montluçon, « et a toutes les charges à lui seul ». Il est cependant considéré comme de « médiocre capacité ».

Après la Révolution, cet ancien lieu noble est en possession de Francis Marier, marquis de Rochedragon qui lègue à sa fille, en 1826, le grand et le petit domaine de Mirebeau, ainsi que les domaines des Floux (ou Esfloux), de Villesoule et des Picards.

Le château de Mirebeau n’a certainement pas connu de hauts faits d’armes, mais le hameau, dispersé à l’intérieur du terroir, paraît avoir eu une certaine importance. Le vieux cadastre montre un parcellaire très morcelé et des maisons réparties à l’intérieur du grand cercle. Une chapelle a laissé son nom avec un champ de la chapelle près d’un vieux cimetière dont on ne peut remuer le sol sans déranger les ossements. Un prieuré y est encore mentionné en 1792, comme dépendant de l’ordre de saint Benoit de Souvigny. Une maison, dénommée l’ « ancienne Mairie » porte un écusson. On montre encore la vieille école « pour les fils de riches » et celle « pour les pauvres », souvenir d’une époque où les enfants étaient éduqués suivant la situation de fortune des parents. Çà et là, on remarque des réemplois sculptés, pouvant provenir du château, de la chapelle ou de maisons de notables. Bref, Mirebeau – Mirbaud – eut un riche passé dont on ne connaît que peu de choses. Il y eut là un terroir florissant groupé autour de son château.

Mirebeau nous paraît être un exemple de ces « villettes » médiévales – on ignore si elle bénéficia de privilèges ou franchises – qui, contrairement à Villefranche, échouèrent dans leur urbanisation. Et pourtant, tout comme le terroir jumeau de Malicorne, cette bourgade fut créée de toutes pièces suivant un plan préconçu, et vraisemblablement par les ducs de Bourbonnais, dans un but précis. Comme dans tout lieu lié à l’histoire, Mirebeau passe pour abriter une poule d’or et ses poussins.

La carte de Cassini montre l’existence d’un large chemin ou allée bordé de végétation reliant Mirebeau à Villesoule. Les deux sites ont dû être intimement liés. Une visite à ce village nous a permis de constater dans les matériaux de démolition d’une vieille grange construite en 1781, la présence d’intéressants réemplois. Ce sont des soubassements de colonnes, des chapiteaux, des fragments de sarcophage en calcaire du Berry. D’après le propriétaire de cette grange, les matériaux proviendraient de Mirebeau, et pourraient être les vestiges de la chapelle.

Ces sculptures et pierres réutilisées nous donnent deux indications. D’abord, la démolition de la chapelle se situerait vers le milieu du XVIII’ siècle. Ensuite, la présence de sarcophages en calcaire, dégagés habituellement sur des emplacements mérovingiens ou carolingiens, confèrerait au site de Mirebeau une origine antique, antérieure au château à motte d’origine féodale. Sans doute ce fait reste normal, sur un site culminant, au passage d’une voie antique.

Il est vraisemblable que Mirebeau ait été relié à Malicorne par une liaison directe. Cette voie a dû passer par les lignes de crête et à des gués importants. On peut la suivre, en partant de Mirebeau par la Croix de Fragne, les hauteurs de Crochavant, le Theix, la Gane, le Gratelet, Chavroche, où existait une motte, le gué de Beau¬franc on dit aussi de Salvert, dominé par une « garde » , Chambouly, Urciers et Malicorne, d’où elle continuait vers Colombier. Cet ancien chemin était encore dénommé, au XVIII’ siècle, chemin de Mirbaud à Colombier .